Chapitre 6

 

LA VOIE DE LA MÉDITATION

 

UN KARMA-YOGI EST UN RENONCIATEUR

 

Le Suprême Seigneur dit : Celui qui accomplit le devoir qui lui incombe sans dépendre des fruits (pour jouissance personnelle) est un renonciateur (Samnyāsī) et un Karma-yogi. L’homme ne devient pas un yogi simplement en s’abstenant de travailler. (6.01)

O Arjuna, ce qu’ils appellent renoncement (Samnyāsa) est aussi connu comme Karma-yoga. Personne ne devient un Karma-yogi s’il n’a pas renoncé aux motifs égoïstes de l’action.[1] (Voir aussi 5.01, 5.05, 6.01, et 18.02) (6.02)

 

LA DÉFINITION DU YOGA

 

Pour le sage qui cherche de parvenir à l’état de yoga (de méditation, ou de l’équanimité du mental), il est dit que le Karma-yoga en est le moyen. Pour celui qui a atteint le yoga, l’équanimité devient le moyen (pour la réalisation du Soi). Dit-on, qu’une personne a atteint la perfection yoguique lorsqu’ il ou elle n’a plus de désir pour les jouissances sensuelles, ou l’attachement aux fruits du travail, et a renoncé à tous les motifs égoïstes.[2] (6.03-04)

 

LE MENTAL EST LE MEILLEUR AMI AUTANT QUE LE PIRE ENNEMI

 

L’homme doit s’élever – et ne pas se dégrader – par son propre mental. Le mental seul est son ami autant que son ennemi. Le mental est l’ami de celui qui le contrôle, et le mental agit comme ennemi de celui qui ne le contrôle pas. (6.05-06)

Celui qui a le contrôle sur le soi inférieur – le mental et les sens – reste calme au chaud et le froid, le plaisir et la douleur, dans l’honneur et le déshonneur, et demeure toujours ferme au Soi suprême. (6.07)

Une personne est nommée un yogi qui possède la connaissance du Soi et la réalisation du Soi, qui est équanime, qui a le contrôle sur le mental et les sens, et pour qui une motte de terre, une pierre, et l’or sont tous identiques. (6.08)

Une personne est considérée comme supérieure qui est égale pour les compagnons, les amis, les ennemis, ceux qui sont neutres, les arbitres, les haineux, les parentés, les saints, et les pécheurs.[3] (6.09)

 

LES TECHNIQUES DE MÉDITATION

 

Un yogi, assis dans la solitude et seul, doit constamment s’efforcer de contempler le Suprême Être après avoir mis son mental et les sens sous contrôle, libéré du désir et de droit de propriété. (6.10)

Il ou elle devrait s’asseoir dans un endroit propre, sur un siège stable qui est ni trop haut ou trop bas, couvert d’herbe sacré Kuśa[4], d’une peau de daim, et d’une étoffe superposées. Là, assis (dans une position confortable), concentrant son mental sur Dieu, et maîtrisant ses pensées et les activités des sens, mettra en pratique la méditation pour sa propre purification. (6.11-12)

La personne doit s’asseoir, la taille, la colonne vertébrale, la poitrine, le cou et la tête droites, immobiles et d’aplomb ; le regard et le mental fermement fixés sur l’extrémité du nez, sans regarder autour de soi ; serein et sans crainte, mettant en pratique le célibat ; le mentale sous contrôle, pensant à Moi, et M’atteignant comme le dessein suprême. (6.13-14)

Ainsi, exerçant toujours le mental fixé sur Moi, le yogi dont le mental est soumis atteint la paix de Brahma-nirvana et vient à Moi. (6.15)

Ce yoga n’est pas possible, O Arjuna, pour celui qui mange trop ou qui ne mange pas du tout ; pour celui qui dort trop ou qui se tient éveillé. (6.16)

Mais, pour la personne qui est modéré dans sa nourriture, son délassement, ses travaux, son sommeil et l’éveil, le yoga de méditation détruit toute souffrance. (6.17)

Il est dit, qu’une personne a atteint le yoga, l’union avec l’Éternel Être (Brahman), lorsque le mental parfaitement discipliné, est libéré de tous désirs, et complètement uni au Brahman en Samādhi. (6.18)

Une lampe abritée (par l’Éternel Être) du vent (des désirs) ne vacille pas ; cette similitude est utilisée pour définir le mental discipliné du yogi qui pratique la méditation sur l’Éternel Être (Brahman). (6.19)

Lorsque le mental discipliné par la pratique de la méditation atteint la quiétude, en quoi l’on devient satisfait avec l’Éternel Être (Brahman) en Le contemplant dans un intellect purifié. (6.20)

En quoi l’on éprouve une infinie félicitée qui est seulement perçue par l’intellect, et est par-delà l’atteinte des sens. Après avoir réalisé l’Éternel Être (Brahman), l’on n’est jamais séparé de la Réalité Absolue. (Voir aussi KaU 3.12) (6.21)

Ce qui, ayant obtenu la réalisation du Soi, on ne regarde aucun gain supérieur à atteindre. L’établissement dans la réalisation du Soi n’est pas ébranlé même par la plus grande calamité. (6.22)

L’état de dissolution de l’association avec la souffrance est appelé yoga. Ce yoga devrait être pratiqué avec une ferme détermination, et sous aucune réserve mentale. (6.23)

On atteint graduellement la tranquillité du mental en abandonnant totalement tous désirs égoïstes, et en maîtrisant complètement les sens des objets de sens par l’intellect, tenant le mental entièrement absorbé dans l’Éternel Être (Brahman) au moyen d’un intellect bien formé et purifié, ne pensant à rien d’autre. (6.24-25)

Tout ce qui fait errer le mental sans repos et instable, on devrait ramener doucement à la réflexion du Seigneur Kŗşna, la Suprême Personnalité de la Divinité.[5] (6.26)

 

QUI EST UN YOGI

 

La suprême félicité est pour le yogi qui a réalisé le Soi, dont le mental est calme, de qui les désirs sont sous contrôle, et qui s’est libéré de tous péchés (ou fautes). (6.27)

Un tel yogi exempt de péchés, qui engage constamment son mental et intellect au Suprême Être (Brahman), atteint aisément l’infinie félicité en contact avec Brahman. (6.28)

Car en percevant l’Éternel Être omniprésent (Brahman) demeurant dans tous les êtres, et tous les êtres demeurant en l’Éternel Être, le yogi qui est en union avec l’Éternel Être, voit chaque être d’un œil égal. (Voir aussi 4.35, 5.18) (6.29)

Ceux qui Me voient en tout et qui voient tout en Moi, ne sont pas séparés de Moi, et Je ne suis pas séparé d’eux. (6.30)

Les non-dualistes qui M’adorent, Moi qui réside en tous les êtres, demeurent en Moi, de quelque façon leur mode de vie. (6.31)

Il est le meilleur yogi qui voit tous les êtres à l’image de son propre être, et qui est sensible à la douleur ou le plaisir des autres comme pour lui-même, O Arjuna.[6] (6.32)

 

DEUX MÉTHODES POUR MAÎTRISER LE MENTAL TURBULENT

 

Arjuna dit : O Kŗşna, Tu as dit que le yoga de la méditation est caractérisé par l’équanimité du mental, mais à cause de l’inquiétude du mental je ne discernes pas l’état stable du mental. Parce que le mental est vraiment instable, turbulent, fort et obstiné, O Kŗşna, je pense que le mental est aussi difficile à maîtriser que le vent. (6.33-34)

Le Suprême Seigneur dit : Sans aucune doute, O Arjuna, le mental est sans repos et difficile à refréner, mais il est dompter par la pratique spirituelle constante et vigoureuse dans la persévérance et le détachement, O Arjuna. (6.35)

J’en conviens que le yoga est difficile pour celui dont le mental n’est pas maîtrisé. Néanmoins, le yoga est accessible aux personnes dont le mental est dompté grâce à des efforts bien dirigés.[7] (6.36)

 

LA DESTINATION DU YOGI SANS SUCCÈS

 

Arjuna dit : Le fidèle qui s’écarte de la voie de la méditation, et est incapable d’atteindre la perfection yoguique à cause du mental insoumis – quelle est la destination d’une telle personne, O Kŗşna ? (6.37)

Ne périssent-ils pas comme un nuage qui se déchire, O Kŗşna, ayant perdus autant (le yoga et le Bhoga[8], les jouissances célestes et mondaines), privés de support et égarés sur la voie de la réalisation du Soi ? (6.38)

O Kŗşna, Toi seulement es capable de dissiper totalement ce doute en moi. Car nul autre que Toi, peut dissiper ce doute. (Voir aussi 15.15) (6.39)

Le Suprême Seigneur dit : Il n’y a pas de destruction, O Arjuna, pour un yogi dans ce monde ou dans l’autre. Un transcendantaliste ne vient jamais à mal, Mon cher ami. (6.40)

Le yogi qui a échoué dans la voie du yoga renaîtra dans une maison des pieux et prospères après avoir atteint le ciel et y séjournant pendant de longues années, ou un tel yogi est né dans une famille de yogis doués de sagesse. Une naissance semblable est vraiment difficile à obtenir dans ce monde. (6.41-42)

Là, il ou elle retrouve la connaissance acquise dans la vie antérieure, et s’efforce à nouveau vers la perfection, O Arjuna. (6.43)

Le yogi qui n’a pas abouti, est instinctivement poussé vers l’Éternel Être (Brahman) par la vertu des impressions (Samskāra) des pratiques yoguiques dans les vies précédentes. Même le chercheur de yoga – l’union avec Dieu – dépasse ceux qui effectuent les rituels Védiques. (6.44)

Le yogi qui poursuit assidûment ses efforts, devient complètement libéré de tous péchés (ou imperfections) après avoir poursuivi graduellement des perfections en de nombreuses incarnations, atteint la Suprême Demeure.[9] (6.45)

 

QUI EST LE MEILLEUR YOGI

 

Le yogi est supérieur à l’ascète. Le yogi est supérieur aux érudits Védiques. Le yogi est supérieur aux ritualistes. Par conséquent, O Arjuna, devient un yogi. (6.46)

Je considère, le yogi consacré – qui affectionnément Me contemple avec une foi suprême, et dont le mental reste absorbé en Moi est le meilleur de tous les yogis.[10] (Voir aussi 12.02 et 18.66) (6.47)

 

Ainsi prend fin le sixième chapitre intitulé «La Voie de la Méditation» dans les Upanişad de la Bhagavadgītā, l’écriture de yoga, touchant la science de l’Absolu dans la forme du dialogue entre Srīkŗşna et Arjuna.

 



[1] Un Karma-yogi est un renonciateur (6.01-02)

Le Seigneur Kŗşna va maintenant exposer la doctrine complète du Divin, dans sa manifestation cosmique, plutôt que dans sa manifestation humaine uniquement. Aussi, nous ne devons pas nous borner à la connaissance de l’Absolu sans relation; c’est-à-dire, nous devons comprendre Sa manifestation dans le multiple. Le Suprême Absolu (Être) est partout, autant dans l’homme que dans la nature, mais Il n’est certainement pas limité par eux.

[2] La définition du yoga (6.03-04)

Nous vivons dans un monde, dont beaucoup parmi nous ne sentent même pas le besoin de la perfection, et vivent de jour en jours, et à bout portant, sans poser trop de questions sur le vrai motif de la vie. Par contre, de ceux qui s’efforcent pour voir la vérité et parvenir au but, quelques uns au fait réussissent. La vérité du macrocosme dans le microcosme, et vice versa, d’où l’importance de l’homme, n’est pas autre chose que la cohérence totale de l’Univers par rapport à chaque point de lui-même. Pourquoi suspecter ou même sous-estimer cette cohérence parce que nous sommes nous-même l’observateur et l’acteur ? Par la Gîtâ, l’homme découvre l’importance du Moi (Soi) intérieur, cette organisme spirituel, animé, en état de naissance, et qui permet l’incorporation réelle de l’homme au Suprême Être (l’Absolu).  Pour l’ensemble de ceux qui participent effectivement, par la grâce, à la vie cosmique de Dieu, la montée, de l’homme, âme vivante s’achèvera lorsqu’il aura atteint le Nirvāna, ou la libération définitive de la naissance et de la mort. N’oublions jamais, l’homme est une espèce comme les autres, mais encore et surtout il est une espèce plus que les autres. Ici, le yoga est important, comme la définition du yoga le montre très clairement dans les verstes 3 et 4. La Gîtâ nous donne un yoga complet, large, flexible, et riche de voie d’action, qui inclut plusieurs phases du développement de l’âme et de son ascension vers le Nirvāna (la libération).

Les différents yogas sont des applications spéciales de la discipline intérieure qui mène à la libération de l’âme, et qu’il faut accomplir par l’effort conscient. Arjuna signifie l’âme humaine à la recherche de la perfection et de la paix. La connaissance métaphysique se transforme en réalisation grâce au yoga, la technique de concentration. Dès les temps très anciens, le mot ‘yoga’ a été employé pour décrire des pratiques et des expériences d’un certain ordre qui sont devenues des différentes techniques d’enseignement comme le Jnāna, le Bhakti et le Karma.

·         Le Jnāna-yoga est la voie de la connaissance. La personne qui emprunt cette voie s’efforcera d’atteindre la perfection spirituelle en cultivant la connaissance, par l’étude des Écritures et des auteurs mystiques et spirituels.

·         Le Bhakti-yoga est la voie de développement de l’amour pour Dieu, en son état pur, sans la moindre action intéressée (Karma). Il constitue l’étape finale du yoga tel que l’enseigne la Bhagavad Gîtâ, dans la pratique de l’abandon de soi au Suprême Absolu, par le Seigneur Kŗşna. Car, Bhakti ou la dévotion est une relation de confiance et d’amour envers un dieu. Le culte de l’inmanifesté est difficile à comprendre pour l’homme de la rue, bien qu’il y ait des exemples de grands advaitins (non-dualistes), qui ont donné à la réalité impersonnelle une grande chaleur de continu affectif. L’adoration du dieu personnel est recommandée comme étant la voie la plus facile, ouverte absolument à tous dans ce monde. Le sacrifice d’amour n’est pas si difficile que l’accord de la volonté avec le dessein divin, ou la discipline ascétique par l’effort persistant du mental.

·         Le Karma-yoga aide le yogi et le dévot à se défaire progressivement de toute souillure matérielle en lui apprenant à purifier ses actes. Le mot ‘Karma’ désigne cette loi selon laquelle l’homme est le résultat de ses actes passés. La loi du Karma est la force vitale de la philosophie du Vedânta : elle permet à l’homme d’être empli de courage et de dynamisme, et d’atteindre le but de l’existence humaine. La solution que la Gîtâ adopte n’évacue pas le monde comme une illusion ni l’action comme un piège. Elle recommande à l’homme vivant dans ce monde une vie pleinement active et une vie intérieure ancrée dans le Suprême Être. Dans cette vie, il faut savoir renoncer. Tant que l’action est fondée sur de fausses prémisses, elle lie l’âme individuelle. Par contre, la Gîtâ enseigne le détachement des désirs et non pas l’abstention du travail, l’action en générale.

Le yoga n’est pas destiné à détruire quelque partie que ce soit de l’instrument psychologique mais à l’entraîner, à le transformer et à l’utiliser d’une manière juste. Maladie, échec, malheur et toutes situations négatives résultant des actions passées (Karma) peuvent être modifiés par un mental concentré et purifié surtout du désintéressement, mais tout cela représente bien peu de choses sans la paix du mental et le désir d’aider autrui.

[3] Le mental est le meilleur ami autant que le pire ennemi (6.07-09)

Ce passage du chapitre 6 se réfère à la réglementation et à l’ajustement du mental, avant de passer aux techniques de la méditation. En ce qui concerne Dhyāna (méditation), il y a trois étapes à suivre en réglant le mental : (1) l’entrée dans la méditation ; (2) la pratique ; (3) la sortie de la méditation. Dès l’entrée, le mental doit être vidé et tranquillisé. Le courant des pensées dont nous sommes à moitié conscients, toutes les pensées vagabondes et confuses doivent être arrêtées. Il faut éviter que ces pensées vagabondes se lèvent de nouveau, il faut également éviter tous les états du mental défavorables ou mauvais, tel que le découragement, la faiblesse des résolutions, le manque de contrôle ou la tension excessive du mental. N’oublions jamais, que c’est le Suprême Être qui donne l’être toute chose et qui est toute chose. Les existences du monde sont maintenues en un tout par le Suprême Être. Ainsi, notre mental doit se trouver attentif au Seigneur Kŗşna, car tant que les activités agitées du mental sont arrêtées la tranquillité durera. Si le mental est réglé et ajusté il ne tombera pas en somnolence et il n’ira pas à la dérive. Quant à la tension excessive du mental cela peut être le résultat de notre effort sincère de pratiquer la concentration ; nous aurons exagéré l’effort et nous nous serons servis de moyens incorrects. Le résultat est que le cerveau se fatigue, avec les conséquences de maux de tête et de la poitrine. Si le contrôle mental est trop relâché, il peut devenir terne et l’attention se disperser, le corps ne sera plus tenu droit, la bouche se trouvera peut-être ouverte et peut baver, tandis que l’on sera vaincu par le sommeil. Dans ce cas il faut renouveler l’attention et l’effort de contrôler le mental, car celui-ci et le corps peuvent s’aider mutuellement dans la réussite de la méditation. Il faut pour réussir, établir une progression graduée d’un état d’activité physique à un état de tranquillité mentale. Ainsi que la respiration doit devenir douce et silencieuse, le courant de l’activité mentale doit pareillement devenir doux et inaperçu. On doit par la suite régler et ajuster les activités du corps jusqu’au moment où la tranquillité et la paix intérieure s’établissent.

Pour régler le mental pendant qu’il demeure en méditation, il y a trois façons de le régler. (1) On doit se servir du cerveau pour concentrer le mental à chaque instant, et il faut trouver des expédients habiles pour prolonger le temps de la méditation de vingt, trente minutes, et même six heures des vingt-quatre de la journée. (2) Il faut pouvoir régler et ajuster les conditions pour qu’elles soient les meilleures possibles pendant toute la durée de la méditation. Si cependant le corps devient trop détendu ou trop tendu, ou relâché, il faut immédiatement le redresser et le rendre attentif. Il se peut que notre corps reste droit, mais que la respiration devienne mauvaise, soit contractée, ou époumonée ou assez forte pour être entendue. Il faut tout de suite corriger ceci et la rendre douce, régulière, silencieuse. (3) Il se peut aussi que bien que le corps et la respiration soient bien réglés, le mental s’en aille à la dérive, ou sombre, ou se relâche ou comme un arc soit trop tendu. Il faut aussitôt ajuster. Il n’y a pas d’ordre fixe pour régler les trois (le corps, la respiration et le mental), il faut simplement régler et réajuster celui qui se trouve déréglé. Tant que nous pratiquons la méditation, il faut tenir ces trois sous obéissance et dans un état d’harmonie. La méditation avec comme guide la Gîtâ, il n’y aura aucun empêchement à l’obtention de l’Illumination, le portail du Nirvāna. Dévouons nos vies à l’ardeur du Seigneur Kŗşna, d’autant plus que nous avons accepté la Gîtâ comme règle de vie.

[4] Kuśa : herbe à longues feuilles pointues et coupantes que long utilise dans les rituels.

[5] Les techniques de la méditation (6.10-26).

Asseyez-vous tranquillement, le matin, à midi ou le soir, ou à une heure désignée par vous, dans une position confortable et stable, que ce soit sur un coussin posé sur le sol, ou même une chaise. La colonne vertébrale, le cou et la tête doivent être dressés en ligne droite verticale, le menton rentré. Les meilleurs moments pour méditer sont le matin de bonne heure et le soir avant d’aller se coucher mais quels que soient l’heure et le lieu choisis, il faut s’y tenir dans toute la mesure du possible car un rythme s’établit ainsi et une habitude spirituelle se crée qui augmente le pouvoir et l’efficacité de la méditation. Assis détendu, concentrez vos pensées sur le point entre les deux sourcils qui est un centre de conscience très important, appelé ‘Ajna’. Le corps est comme un bateau gouverné sur l’océan de la vie par le mental qui en est le capitaine et qui le dirige en partant de ce point entre les sourcils que l’on peut comparer au pont. La conscience universelle elle-même est située dans ce centre bien qu’il ne faille pas le confondre avec la position des glandes du corps physique qui fonctionnent sur un plan de conscience plus bas. Concentrez et localisez le mental sur ce point. Placez-y le noms du Seigneur Kŗşna (Krishna), ou remplacer par le mot de puissance ‘OM’, le symbole de tout ce qu’il y a de plus haut et de plus beau. Parfaitement détendu, fixez votre mental sur le Seigneur Krishna (un autre avatâr ou dieu même d’une religion différente) ou sur le Nom « OM » (AUM) pendant cinq à dix minutes. Pendant quelques jours, cela risquera de probablement vous ennuyer et vous manquerez d’enthousiasme. Mais vous devrez être patient et persévérer dans l’effort. Si vous accomplissez cette pratique pendant quelques mois sans attendre aucun résultat tangible, vous verrez une nouvelle lumière s’animer dans votre mental et vos pensées prendront une direction nouvelle. Concentrez-vous toujours sur la Gîtâ, et donc la Vérité Une et Éternelle qui imprègne tout.

Une fois par jour, à un moment résolu, faites un examen de conscience minutieux et impartial et notez soigneusement les points faibles les plus importants de votre caractère. Soyez pour vous mêmes un juge sévère, sans aucun découragement émotif et mettez de côté tous vos préjugés. Chaque jour, prenez un de vos points faibles et décidez-vous à en triompher. N’ayez pas de remords, n’en soyez pas attristé mais simplement soyez résolu à vous maîtriser. Déterminez aussi quelle est la vertu exactement à l’opposé de la faiblesse que vous désirez extirper et méditez sur ce sujet. Cela implique d’exclure toute autre pensée du mental. Si possible, consacrez au moins dix minutes par jour à cet exercice, et faites-le quotidiennement au même moment et prenez-y intérêt. Le soir, avant d’aller vous coucher, interrogez-vous pour savoir jusqu’à quel point vos efforts ont été couronnés de succès. Ne vous découragez pas si vous ne réussissez pas directement, mais imprégnez votre mental de courage, de confiance en vous.

1.       Les repas et lieu de méditation. Le repas doit être pris depuis quelques heures afin que la digestion soit accomplie et le corps ainsi que les vêtements doivent être parfaitement propres. Le régime alimentaire ne doit pas être lourd, l’alcool est interdit. Se retirer dans une chambre tranquille où l’on est assuré de n’être dérangé par aucune intervention ni aucun bruit. Trouvons une chambre réservée exclusivement pour la méditation, qui sera votre sanctuaire. Le silence est absolument nécessaire.

2.       La posture. S’établir dans une position aisée n’occasionnant aucune gène, position que l’on puisse conserver sans fatigue, ou douleur, pendant un temps long. La position classique des Orientaux avec les jambes croisées est à peu près impossible pour les Occidentaux.  Son but est de ralentir la circulation dans les membres inférieurs, afin qu’un afflux de sang plus important soit dirigé vers le cerveau, ce qui facilite sa plus grande activité. L’occidental moins assoupli, devra donc à faute de mieux, s’asseoir sur une chaise ou un tabouret (ou, banc de méditation), ayant soin de garder le buste droit (la colonne vertébrale et la tête doivent être en ligne droite), les mains reposant sur les cuisses paumes ouvertes (ou, la main droite reposant paume ouverte sur la main gauche). Les yeux légèrement baissés, pour limiter le champ de vision, ou complètement fermés, si on peut le faire sans céder au sommeil. L’attention doit être concentrée entre les sourcils. Pour les débutants, il est utile avant de commencer les méditations, de s’exercer quotidiennement à demeurer assis de cette manière pendant 5. 10, 15, 20 minutes, afin de discipliner le corps et n’avoir plus à s’en occuper quand la méditation commencera. Comme déjà dit, on doit le faire chaque jour à la même heure, ainsi qu’on le fera au début de la méditation.

La respiration.  Beaucoup de personnes font confusion entre les idées et les pratiques de la respiration du Yoga des Hindous. Il est ainsi utile de donner certaines explications sur les exercices Hindous de respiration rythmique, mais l’on doit se rendre compte que seuls deux exercices Yogiques : la respiration dite de purification et la respiration rythmique sont sans danger pour nous. Le yoga est une science expérimentée qui permet à chacun d’obtenir un contrôle inusité de son corps et de son esprit. Le mot « Yoga » employé dans l’Hindouisme veut dire l’union avec Brahma, le Suprême Absolu, l’Être Suprême, et quand on respire, le corps absorbe avec l’air une force appelée « Prâna » (énergie vitale) qui est latente dans l’atmosphère.

(1)     Respiration Purificatrice.

Pour purifier le système respiratoire, cet exercice est indiqué :

Fermez la narine droite, en la comprimant sur le côté avec un doigt. Aspirez alors par la narine gauche. Renvoyez l’air aspirez en exhalant par la narine droite ; recommencez en comprimant la narine gauche et en aspirant l’air par la narine droite, et ainsi de suite. Les voies respiratoires seront ainsi nettoyées de l’acide carbonique et autres impuretés. Si la rétention du souffle indiquée est trop longue pour certains, nous conseillons :

Aspirer en comptant huit ;

Retenir le souffle en comptant quatre.

Expirer en comptant huit.

Rester sans respirer (vide) en comptant quatre.

(2)     Respiration Rythmique.

Voici un exercice très estimé :

Vider les poumons en comptant six.

Rester sans respirer en comptant trois.

Remplir les poumons et le thorax en comptant six.

Retenir l’air en comptant trois.

Il ne faut pas que les comptes de la respiration soient plus rapides, ni plus lents que le battement du cœur. Cette respiration doit être rythmique, et deviendra par la suite automatique. Un conseil, il vaut mieux commencer par cette pratique respiratoire en dehors des heures saintes de méditation pour s’y habituer. On doit comprendre que plus tard on peut augmenter le nombre des comptes et retenir la respiration plus longtemps, mais si un débutant essaie la rétention du souffle, il se peut qu’il ressente des vertiges ou autres troubles. Il faut toujours se rappeler que le motif de cette respiration est de purifier le corps, de fortifier le système nerveux et de calmer le mental, mais en évitant tout surmenage.

Les deux exercices dont partie du « Prânâyâma » pratiqué dans les systèmes Yogiques des Hindous.  L’homme est une réplique de l’Univers : de même qu’il y a dans l’univers des systèmes solaires et galactiques et d’autres encore, de même sont-ils représentés dans l’homme. Ce n’est pas tout car il y a une correspondance directe entre l’homme et tous les centres du Cosmos. Comme il est dit que le Suprême Absolu réside dans le Ciel bien qu’Il soit en toutes choses et est toute choses, ainsi réside-t-il dans le cœur de l’homme dans Sa forme personnelle et dans le centre du cerveau dans Sa forme impersonnelle. Lorsque, détendu, vous aurez respiré maintes fois et que vous aurez ouvert vos structures physiologiques et mentales au cosmos tout entier avec lequel elles sont reliées, vous éprouverez une sorte de paix que le monde ne peut fournir, une sorte de délectation qui ne sont pas créées par le contact des sens avec quelque objet que ce soit.

Une simple technique de méditation est exposée ici :

(1)       Lavez votre visage, yeux, mains, et pieds[5] ; et asseyez-vous dans un lieu propre, silencieux, et sombre[5], empruntant n’importe quelle position confortable, avec la tête, le cou, et la colonne vertébrale droite et verticale. La musique ni l’encens sont recommandables pendant la méditation. L’heure et le lieu pour la méditation devraient être fixés au préalable. Observez les yama et les niyama (voir page 6), comme étant les bons principes de vie, autant en pensées, paroles, et actions. Quelques exercices yogiques sont nécessaires. Minuit, matin et soir sont les meilleurs moments pour méditer 15 à 25 minutes chaque jour[5].

(2)       Souvenez-vous du nom ou de la forme du dieu personnel (Isht Dev) en qui vous croyez, tout en implorant Son ou Sa bénédiction.

(3)       Fermez vos yeux[5], et faites cinq à dix respirations lentes et profondes.

(4)       Fixez votre regard, l’intellect, et émotions au-dedans le centre du thorax, le siège du cœur causal, et respirez lentement. Chantez mentalement « So » lorsque vous aspirez, et « Hum » lorsque vous expirez. Pense que c’est la respiration elle-même qui retentit les sons « So et Hum » (Je suis Cet Esprit). Visualisez mentalement et poursuivez la voie respiratoire par les narines, jusqu’au centre situé entre les sourcils, en descendant jusqu’au centre de la poitrine, ou les poumons. N’essayez pas de contrôler ou de conduire votre respiration, mais suivez le cours naturel de votre respiration.

(Consulter également, « Introduction à la Bhagavad Gîtâ »)

[6] Qui est un yogi (6.27-32).  Le yogi ou le dévot véritable et humble tient pour peu de chose tout ce qui est dans le monde, aussi bien que sa propre personne, et, se confiant en Dieu, s’abandonne à Lui. Cet homme véritablement humble supporte patiemment et en silence les souffrances intérieures, il avance ainsi rapidement, en peu de temps, comme l’esquif poussé par le vent. Le yogi ou le dévot trouve le Suprême Absolu partout ; qu’on l’injurie, qu’on le méprise, que les hommes le couvrent d’opprobres, il accepte tout avec sérénité, l’âme en paix. Il n’est pas troublé par ses imperfections qu’il essaie de corriger, quoiqu il soit pénétré de douleur jusqu’au fond de l’âme d’avoir offensé le Suprême Absolu et Seigneur qu’il aime. Il ne se tourmente pas non plus du regret de ne pouvoir accomplir de grandes choses, car il se met toujours en face de son néant et de sa misère ; bien plus, il s’étonne de pouvoir réaliser un seul acte vertueux et il rend grâce au Suprême Seigneur de ce qu’Il le lui permet, en se disant que c’est le Seigneur qui fait tout, étant continuellement mécontent de ce qu’il fait lui-même. Pour le yogi ou le dévot en contact avec le Suprême Absolu, Il n’est plus une simple rumeur ou une aspiration vague, mais une réalité vivante, avec laquelle nous sommes en contact positif. La religion n’est pas affaire dialectique, mais fait d’expérience. Plus profonde est l’expérience de la réalisation de Soi, plus étendue est sa compréhension. Une fois unis au Suprême en nous, nous le sommes aussi avec l’évolution totale de la vie.

[7] Deux méthodes pour maîtriser le mental turbulent 6.33-36).  Arjuna comprend qu’il y a dans la nature humaine un élément important d’obstination et de violence, d’hésitation et de volonté personnelle. Nous sommes enclins à fermer les yeux aux défauts de notre nature et à endurcir nos cœurs contre la lumière. Arjuna demande aussi ce qu’il advient de l’âme qui tente et échoue. La défaite est temporaire, car celui qui commence bien parvient à ses fins. La dévotion au Suprême Seigneur est l’un des plus sûrs moyens pour purifier la volonté et l’intellect.

 

[8] Jouissances matérielles.

[9] La destination du yogi sans succès (6.37-45).  La question d’Arjuna se rapporte à l’avenir de ceux qui meurent sans être en conflit avec la Suprême et Éternelle Bonté, tout en ne s’étant pas maîtrisés suffisamment pour contempler la magnificence de la Pureté Éternelle. Est-ce que l’alternative est entre un ciel éternel et un enfer éternel comme les religions de Foi Abrahamiques font croire, où y a-t-il une chance pour ces âmes de marcher vers la perfection après la mort ? Qu’arrive-t-il à ces nombreuses âmes qui n’ont pas réussi à suivre le sentier de yoga jusqu’à la fin ? Leurs efforts sont-ils entièrement inutiles ? Vaut-il la peine de commencer une entreprise que l’on n’est pas capable d’achever ? Aucun homme dont la vie est honnête ne veut venir à mal ; et, aucune âme bonne ne peut avoir une fin mauvaise, comme prétendent les religions qui prêchent, « en dehors de notre Foi, il n’y a pas de salut ». Le Suprême Absolu connaît nos faiblesses et les efforts que nous faisons pour les surmonter. Il n’y a pas lieu de désespérer, car même l’échec ici-bas est un succès, et aucun effort sincère ne va sans récompense. L’évolution sur la voie qui même à la libération est lente et l’on peut avoir à le suivre pendant bien des existences terrestres, mais nul effort est perdu. Maître Eckhart écrit : « Si tu ne pèches pas en intention mais seulement en capacité, vraiment tu as fait tout le nécessaire aux yeux de Dieu ». Johann Wolfgang von Goethe : « Pour celui qui s’efforce et recommence, la rédemption est toujours possible. » Les desseins de Dieu ne seront pas accomplis tant que tous les êtres humains ne seront pas sauvés par le pardon, la repentance et la maîtrise, et rendus à la Suprême Demeure. Chaque âme sera ramenée au Suprême Être qui l’a créée à son image. L’amour de Dieu est harmonie, et c’est que la Gîtâ enseigne, et nous donne la foi, et l’espérance pour le salut assuré de tous.

[10]  Quel est le meilleur yogi ? (6.46-47). Simplement ceci, le meilleur yogi est le grand dévot (Bhakta). Yoga ou l’union avec le Suprême Absolu obtenue par Bhakti-yoga est le But Suprême. Dirige-toi, donc aspirant, yogi, dévot, âmes vivante, dirige-toi dès maintenant sans distraction vers cet heureux état. Le Seigneur t’appelle ; Pourquoi encore hésiter ? C’est au fond de ton cœur qu’Il veut te renouveler, te changer, t’enrichir, te vêtir, te révéler la voie de la libération, tout en étant plein d’allégresse, de joie, de calme et de paix. L’Essence du Suprême Être, aussi en nous est de la nature de l’Univers Cosmique donc incréé et indestructible, c’est ce qu’il faut Réaliser.